Il y'a encore deux jours si l'on vous demandait que vous évoquent les termes France et Brésil pris ensemble, vous auriez très probablement répondu France 98, Coupe du Monde ou encore 3-0, en somme des bons souvenirs et des émotions fortes et intenses comme seul le sport sait parfois nous en procurer. Hier 1er juin, en ce lundi de Pentecôte, Français et Brésiliens ont été envahis par une même et unique émotion mais l'ambiance n'était ni à la samba ni à la rumba que ce soit à Paris ou à Rio. Alors que la France entière apprenait à la mi-journée la disparition d'un Airbus A330 de la compagnie Air France, à quelques 8.500 kilomètres de là, sur la rive ouest de l'Océan Atlantique Sud, c'est également tout un peuple qui s'est réveillé dans la douleur et dans le deuil. Des deux côtés de l'Atlantique, que ce soit à Roissy Charles de Gaulle ou à l'aéroport de Rio de Janeiro, pour éviter que les familles des présumées victimes soient assaillies par des journalistes trop virulents, les autorités locales des deux pays ont préféré à juste raison isoler les familles des victimes présumées, dans des zones qui se trouvent en retrait des foules aéroportuaires, afin de les placer à l'abri des caméras de télévision et des flashs crépitants.

Voyeurisme malsain

Mais une fois de plus, les médias français ont fait preuve d'un manque de pudeur intolérable dans la couverture médiatique de cette catastrophe aérienne : toujours plus de bruits de couloirs, toujours plus de sensationnel, toujours plus de voyeurisme. Certes, une des missions du journaliste est d'emmener son public au plus près de l'information pour lui exposer au mieux la vérité, certes il n'est pas toujours facile pour un présentateur de meubler le temps d'antenne en direct lorsqu'on ne dispose que de très peu d'informations concrètes sur les raisons qui ont pu engendrer la catastrophe, en l'occurrence la perte de l'avion ; mais ces facteurs ne doivent en aucun cas constituer des raisons valables pour franchir les frontières du domaine de l'intime ou encore celles de l'immense choc émotionnel que peut provoquer la perte soudaine d'une mère, d'un fiancé ou d'un ami, de surcroît lorsqu'on ne sait pas encore où se trouvent les corps des présumées victimes.

Information Émotion

A ce propos, tout au long de la journée d'hier alors que les familles des victimes présumées affluaient au compte-comptes vers les terminaux des aéroports de Paris et de Rio de Janeiro, plusieurs journalistes de chaines de télévision françaises d'information en continu qui se trouvaient en plateau, n'ont pas hésité à poser des questions totalement absurdes et déplacées à leurs leurs envoyés spéciaux. Celles-ci portaient notamment sur l'ambiance qui régnait à l'intérieur des dits aéroports, sur l'état dans lequel les familles et les proches se trouvaient, sur ce qu'ils faisaient... Aujourd'hui encore en fin d'après d'après-midi, une journaliste de la rédaction de LCI a posté un bref article intitulé « Vol AF447 - "Dis-moi que t'es bien rentrée stp..." », dans lequel elle relate une phrase qu'une amie d'une victime du vol Air France, a publie hier sur le réseau social Facebook. Qui cela regarde, qui cela intéresse, laissons les familles et les proches des victimes en paix dans ces instants si pénibles et douloureux à traverser. D'ailleurs ce n'est pas un hasard si cet après-midi, Air France a rappelé à l'ordre les médias en les priant de respecter le deuil des familles, haro contre la dictature de l'information émotion !